Ainsi font, font, font, les naissances indésirables...
Elle est enceinte. Elle ne peux plus se cacher de la vérité, plus cacher ce ventre arrondis, cette si jolie rondeur qui précéde une naissance.
"C'est une fille ! Toute mes félicitations !"
Une fille... Un rictus de douleur et de dégoût déforme les doux trais de cette jeune femme. Trop jeune pour une mère... Elle ferme les yeux, mais aucune image ne lui vient en tête. Elle pense au père... Sans savoir qui est-ce. Fut-ce un des Onzes Dieux auquels elle croyait, un simple homme, ou même un honorable Ange ou Démon, pour elle, ce n'était qu'une abomination, un monstre, lui volant sa vertue. Un haut-le-coeur l'agite. Elle condamne déjà l'enfant. Elle rouvre les yeux et fixe la doctoresse babillarde qui lui parle joyeusement de la santé de... sa ... ? Non ! de LA fillette. Elle l'interrompt brusquement :
"Y a-t-il un moyen de la tuer ?"
La sage femme tait, avant de balbutier :
"Je... Euh... Je suis désolée... La grossesse est trop avancée..."
Une lueur de pitié brille dans les prunelles du médecin, elle en est sûre. Elle inspire profondemment, un souffle qui ne fait que raviver la colère qui brûle en elle. Après avoir remercier froidement ce maître des soins, elle s'en va en coups de vent, s'éloignant à grands pas.
Elle s'effondre sur une chaise, le souffle court, épuisée malgré la courte distance qu'elle vient de parcourir... Son regard s'égard sur les formes de son ventre, sur lequel elle y pose une main... Ce bébé... Ce bébé sera son pire cauchemard, elle le sait. Elle est pauvre, et a déjà du mal à se nourrir et se loger correctement. Pauvre, oui, mais sous la couche de crasse qui la recouvre, elle est jolie. Très jolie... Et le malheur voulu qu'on s'en apperçoive, attirant convoitise et jalousie. Un coup lui parvient, manifestation de la petite, et elle plante son ongle dans sa peau, la marbrant de rouge.
"C'est pour bientôt", avait dit la sage femme. Des larmes jaillirent de ses yeux et roule, creusant des sillons blanc, sur ses joues sales. Elle abandonnera l'enfant. Elle n'en veux pas. Et puis ce n'est pas le sien... C'est celui de... de la chose ignoble !
Quelques semaines plus tard, elle tient à bout de bras une bébé. La répulsion ne l'a pas quitté ne serait-ce qu'une seconde. Pire, elle a redoublée à la vue de 'sa' fille, sa folie lui montrant le visage monstrueux qu'elle avait tant imaginée, au lieu de la bouille souriante et rose. Elle marchait dans la rue, contemplant sa descendance. Puis elle n'y tient plus. Dans un hurlement de terreur, de rage, d'horreur, elle lache la fillette dans la boue et s'enfuit en courant.
Le couteau glisse sur la pierre. Un braillement se fait entendre, cri que tout parents devraient reconnaître. Celui d'un petit affamé, seul, abandonné... et trop jeune pour l'être. La ruelle est sombre, personne n'y passe : Il est tard, et la nuit, la ville regorge de bandits, voleurs, devenant un véritable coupe-gorge, où seul les idiots s'aventurent.
Bruits feutrés, râles étouffés, pièce qui tinte discrétement, changeant de propriètaire, ricanement gras et salace... Et ce couteau, toujours, que l'on aiguise contre le granit. Un autre cri déchire l'obscurité. C'est le nourrisson qui ne se fait pas oublier. Pourtant, personne ne s'approche de l'endroit où sa mère l'a laissé.
Cette mère - car même si elle le nie, elle n'en demeure pas moins comme telle -, dans son taudis, écoute ces hurlements qui l'accuse, les yeux écarquillées, rongée par le remord, dévorée par la honte. Brusquement, elle se lève, n'y tenant plus, et se précipite dehors. Pendant neuf mois, elle avait porté cette vie, et l'avait aimé en la haïssant. Elle ne peux pas... C'est sa chair, son sang, ses os, même si mélangé à ceux d'un homme qu'elle ne désirait pas. Elle se précipita vers sa fille, et la serra contre elle, mélant ses pleurs à ceux de l'enfant.
Le doux bruit du couteau qu'on affute est près, trop près.
Soudain, elle hoquète, et une bulle de sang naît au coin de sa bouche, avant de s'effondrer, une dague fiché dans la poitrine. Une ombre repousse doucement le corps, avant de saisir la nouvelle-née. Cette dernière s'est tue, s'appliquant à lécher le sang méler à de la boue qui macule ses cheveux, ses joues, puis ses mains.
La silhouette longue et musclée est celle d'un homme... Le nourrisson s'accroche à sa peau et le fixe gravement de son regard vert. Un sourire à la fois tendre et cruel étire ses lèvres.
"Ma fille..."
(Ce background est, à l'origine, le BG de mon personnage sur un MMORPG auquel je joue nommé Dofus.)